Portrait d'artiste

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Interview

Qu’est-ce que cela signifie d’être artiste ? Mon processus créatif se déroule en deux temps : je commence par adopter une attitude ou un concept, puis je pars à la recherche d’images visuelles qui y correspondent. Des matériaux variés, extraits de carnets, journaux ou symboles sont réunis pour créer l’exposition. Dans une perspective contemporaine, trois grands thèmes traversent mon travail. Tout d’abord, l’idée de l’artiste comme quelqu’un qui, à travers des images, métabolise des thèmes symboliques à destination du public, créant ainsi un paysage poétique visuel ou un texte visuel. Ensuite, en tant qu’artiste et photographe, je réponds à ma quête visuelle en convoquant des combinaisons d’éléments capables de mieux servir le sujet choisi. Enfin, selon une vision esthétique qui oriente mon regard sur le monde, mon travail est un processus organique de renouvellement, d’équilibre, et une dialectique constante entre la permanence et l’impermanence de l’être et du devenir.

Y a-t-il eu un moment ou une rencontre marquante dans votre parcours ? Oui. En 1989, mon père est décédé au Brésil. La famille a donc pris l’avion de Brasilia vers Mexico. Nous survolions Manaus et l’Amazone à bord d’un Learjet. Lors de l’atterrissage, un oiseau a traversé notre trajectoire et le pilote a dû manœuvrer pour éviter une collision. Un peu plus tard, en vol, l’immensité de la jungle vue de là-haut, à 1000 mètres d’altitude, avec la ligne turquoise de l’atmosphère terrestre à l’horizon, m’a profondément bouleversé. À cette époque, je vivais aux Pays-Bas. Venant d’un univers industriel européen, j’ai ressenti de plein fouet les contradictions liées à notre manière agressive de traiter notre relation à la Terre. C’est là que l’image de l’homme-oiseau m’est apparue : un personnage tourné vers l’avenir, mêlant surprise et espérance. Cet alter ego visait à incarner des idées plus vastes comme l’empathie, l’équilibre, et la vie en tant que processus pour sauver ce qui reste d’humanité, pour préserver le vivant. Dans la culture mésoaméricaine, nous appelons cela le Nahualli : une manière de partager notre condition humaine avec l’énergie essentielle qui émane de la nature.

Comment décririez-vous votre univers en trois mots ? Exploration, dessin lyrique, contemplation.

Si vous deviez citer un artiste qui vous a inspiré ? Joseph Beuys, en particulier ses dessins.

En quoi vos origines ou votre histoire personnelle influencent-elles votre art ? J’ai vécu dans de nombreux pays, mais être Mexicain est en soi une expérience unique. Il y a une dualité typiquement mexicaine entre chaos et sobriété. À Mexico, chaque instant exige une acuité visuelle et une vivacité d’esprit extrêmes. La réalité et les motifs s’y superposent et coexistent dans une forme de contemplation silencieuse, ce sont ces images que j’expose à la Galerie Lodo. Mon travail intègre par ailleurs le formalisme moderne, des méthodes hybrides, et des motifs visuels issus aussi bien de l’urbain que du rural.

Combien de temps vous faut-il pour créer une œuvre ? La création est lente, car elle superpose différentes strates et processus. Dessins préparatoires, numérisation, travail manuel, techniques digitales… Le processus est élastique. Il peut me falloir des années pour recombiner une pièce, ou parfois une semaine. J’intègre dans mes œuvres des archives, des images urbaines, des carnets, du dessin poétique. La technologie et la postproduction font partie intégrante du travail, elles doivent être soignées.

Quel message ou quelle émotion souhaitez-vous transmettre à travers votre œuvre ? Des idées comme la transmigration ou la poétique sont mêlées dans un processus continu, avec l’intention de rappeler que vie et biologie ne font qu’un. Cette prise de conscience devrait nous amener à dépasser une vision dualiste ou matérialiste de la vie. À terme, le sentiment d’une intégration complète à notre environnement devrait nous guider vers un avenir plus harmonieux.

Y a-t-il une œuvre d’art qui a une signification particulière pour vous, et pourquoi ? Oui. Il s’agit d’un dessin de Léonard de Vinci, conservé à la National Gallery de Londres. Il représente la Vierge, l’enfant Jésus, et ses cousins. Ce dessin est magnifique, imparfait, inachevé et pourtant, dans sa poésie visuelle d’une grande intelligence, il exprime précisément les idées que je défends : la vie comme processus, l’équilibre entre forces antagonistes, et l’empathie.

Comment réagissez-vous face aux différentes interprétations de votre travail par le public ? Je suis toujours reconnaissant. Ce que j’apprécie le plus dans la critique, c’est qu’elle permet souvent à d’autres de formuler des idées ou des émotions que je n’arrive pas toujours à exprimer clairement par l’image. Je perçois des choses visuellement que mes mots ne savent pas dire, donc loin d’être blessé dans mon ego, je me sens nourri et stimulé par ces retours.

Quelle musique écoutez-vous lorsque vous créez ? J’aime laisser la radio en fond sonore, cela me libère d’un souci excessif du détail. J’écoute des harmonies et des musiques alternatives : Brian Eno, Talking Heads, et certaines variantes du punk.

Une citation qui vous inspire ? J’aime beaucoup cette idée de Paul Klee : « Dessiner, c’est emmener une ligne en promenade. »